Invitées par Jean Luc Deschamps directeur du “Département des Écartés”, qui dépend du département de philosophie de l’Université de Paris 7, l’association Inscrire a réalisé des ateliers de peinture sur céramique avec des femmes de la très sérieuse prison de Fresnes près de Paris.

Françoise Schein et Lohana Schein se sont déplacées deux fois à  la prison pour vivre une expérience unique avec des femmes qui avaient commis des petits et très grands délits.

A l’entrée de Fresnes nous sommes obligées de laisser nos sacs, téléphones, bijoux et effet personnels. Nous passons les grilles et le système de détection d’objet dangereux comme à l’aéroport. Ensuite nous traversons une cour pavée avec notre matériel. Nous grimpons  6 marches. Nouvel arrêt devant une porte grillagée. On nous ouvre, nous entrons dans la partie «grand hall central» avec coursives sur deux étages qui donnent sur les cellules. Un filet est tendu au 1^er étage pour empêcher les suicides.

Le bâtiment est chaud, clair, le sol est lisse. Les portes claquent lourdement. De grandes belles femmes sont les gardes. Elles ont des jambes immenses et sont habillées de bleu marine. Dans notre atelier situé au rdc dans une «grande cellule », 7 femmes sont venues dont une Anglaise, qui n’est pas restée très longtemps car trop émotive.
Il y a trois basques de l’E.T.A. et nous font comprendre qu’elles sont des terroristes basques. Ces 3 femmes sont très cultivées et intelligentes, clairement les plus douées du groupe.
L’une, la plus âgée, peint une fleur puis dit “ Vous avez raison, la céramique, c’est pour les femmes car ainsi on les assied, elles sont calmes et ne bougent pas…” Plus tard elle me demande comment elle pourrait apprendre plus de cette technique et où peut on acheter ce matériel. Je lui réponds que plus tard elle pourra, en effet refaire ce travail si cela lui plait. Plus tard, dit elle, je ne suis pas prête de sortir !
Une femme africaine sympathique, très croyante et chrétienne nous parle: j’ai deux enfants dit elle.  – Ah oui ? quel âges ont ils ?  L’un est mort né et l’autre est mort à 4 mois ! C’est la destiné. Mais quand on me demande si j’ai des enfants, comme je les ai porté, je dis que j’en ai deux.”
Lætitia, fine, a 3 enfants qu’elle ne peut jamais voir. Elle ne les voit pas mais fait 3 céramiques pour chacun d’eux, comme cadeau de Noël.

Mélanie, sympathique blonde, peint un hérisson entouré des prénoms de ses enfants. Elle va offrir ces carreaux à ses enfants. Elle en a pris pour plus de 15 ans dit elle.
Yannick , une femme forte, peint un chat du Palais de Fronteira de Lisbonne. Elle peint bien.

Nous sommes arrivés à 14h et repartons à 17h30. Les gardes nous ont offert 30 minutes de plus car les femmes étaient très heureuses avec nous.
Nous refaisons le chemin inverse. Demain je mettrai leurs carreaux au four et retournerai vendredi prochain pour leur donner.
Je suis, en effet, retournée pour donner les carreaux aux femmes mais une semaine plus tard j’ai appris que la directrice n’avait pas voulu leur laisser car ces objets, disait-elle pouvait devenir des armes. J’ai insisté pour qu’elles puissent quand même les garder, mais n’ai jamais eu de réponse. Je leur ai fait un dossier en papier avec leurs œuvres ainsi chacune a quand même eu un souvenir de son expérience et de son travail .

Alexandre Vanautgaerden
Jean François Cottier

Département de Philosophie de l’université Paris 7

Françoise Schein
Lohana Schein